Comment fonctionne une entreprise d’insertion ?

Les entreprises d’insertion remettent des personnes sur le chemin de l’emploi en combinant activité économique réelle et accompagnement social sur-mesure. Pour comprendre leur fonctionnement, mieux vaut regarder ce qui se passe au quotidien, au plus près des ateliers, des chantiers et des équipes qui encadrent.

Comment fonctionne une entreprise d’insertion : définition, cadre légal et public visé

Une entreprise d’insertion (EI) est une entreprise à part entière qui vend des biens et services dans le secteur concurrentiel, tout en poursuivant une finalité sociale claire : remettre en emploi des personnes qui en sont durablement éloignées. Ce modèle est encadré par le Code du travail (insertion par l’activité économique) et s’appuie sur une convention de trois ans conclue avec l’État pour préciser l’ambition sociale, le projet économique et les moyens mobilisés.

La différence avec une entreprise classique se situe dans la mission. En EI, la performance inclut des indicateurs sociaux : progression des compétences, sorties vers l’emploi durable ou la formation qualifiante, stabilisation dans la vie quotidienne. L’emploi n’est pas une fin, mais un levier de reconstruction grâce à un cadre de travail bienveillant et exigeant.

Le public visé regroupe des profils variés confrontés à des freins d’accès à l’emploi. S’y retrouvent des jeunes sans qualification, des demandeurs d’emploi de longue durée, des bénéficiaires de minima sociaux (RSA, AAH, ASS), des personnes suivies par l’aide sociale ou en sortie de détention. L’objectif est d’ouvrir une porte, avec des étapes réalistes, vers un emploi durable.

Pour illustrer, imaginons Nadia, 27 ans, sans diplôme, mère d’un enfant et sans permis. Elle intègre une EI de logistique, 24 heures par semaine au départ, avec un accompagnement dédié sur la mobilité (auto-école sociale), le rythme (planning progressif) et la formation (préparation au CACES). Mois après mois, elle sécurise sa situation, apprend, se prouve qu’elle peut réussir, jusqu’à viser un CDI.

Ce qui fait l’ADN d’une EI

L’insertion par l’activité économique repose sur une expérience de travail réelle et des appuis concrets. L’encadrement technique et l’accompagnement social sont structurants : chaque salarié bénéficie d’un référent socioprofessionnel et d’un encadrant métier. Les compétences sont travaillées en situation, avec des formations complémentaires internes ou externes.

• 🛠️ Production en conditions réelles (qualité, délais, sécurité).
• 📚 Formations utiles (remises à niveau, CACES, habilitations, éco-gestes).
• 🧭 Accompagnement (logement, santé, dettes, mobilité, garde d’enfants).
• 🤝 Partenariats (France Travail Insertion, associations, entreprises locales).
• 📈 Objectifs mesurés (compétences, autonomie, sortie vers emploi/formation).

Les exemples inspirent. Dans le réemploi, Envie reconditionne des appareils électroménagers, Le Relais trie et valorise le textile, Rejoué donne une seconde vie aux jouets. Côté bâti, APIJ Bat accompagne vers les métiers du bâtiment avec une exigence de qualité. Dans les services, La Conciergerie Solidaire crée des emplois de proximité. Ces initiatives démontrent que l’insertion peut rimer avec innovation et écologie.

• ♻️ Envie : réemploi d’électroménager, formation technique et service après-vente.
• 👕 Le Relais : tri textile, logistique, création de filières locales.
• 🧩 Rejoué : collecte, hygiénisation, revente à petit prix des jouets.
• 🏗️ APIJ Bat : chantiers-écoles, sécurité, gestes éco-construction.
• 🏢 La Conciergerie Solidaire : services aux entreprises et résidences.

À ce stade, le message clé est simple : l’EI est une entreprise marchande qui place l’humain au cœur de la performance.

Au quotidien : contrats, organisation, aides publiques et résultats mesurables

Le fonctionnement s’appuie sur des règles claires. Le recrutement se fait via un contrat à durée déterminée d’insertion (CDDI), d’au moins 4 mois, renouvelable dans la limite de 24 mois selon la situation du salarié. La durée hebdomadaire est comprise entre 20 et 35 heures, modulable pour tenir compte des contraintes de vie et du projet d’insertion.

Les salariés en CDDI ont les mêmes droits que dans toute entreprise : SMIC minimum, congés payés, protection sociale, droit à la formation, santé et sécurité au travail. Le contrat peut être suspendu, par exemple pour une période de mise en situation en milieu professionnel (PMSP) chez un autre employeur, ou pour une période d’essai liée à une proposition de CDI ou de CDD d’au moins 6 mois. Ces passerelles testent des projets, sans casser la dynamique.

Pour piloter l’équilibre économique, l’EI fonctionne comme une TPE/PME classique : facturation, gestion des coûts, prospection commerciale, qualité. Mais elle investit aussi dans l’accompagnement, ce qui justifie des aides publiques encadrées et conditionnées aux résultats d’insertion. L’aide au poste d’insertion comprend une part socle révisée chaque année (à titre d’illustration, 11 381 € par poste en 2022 pour les EI) et une part modulée, indexée sur le profil des personnes, les moyens mobilisés et les résultats (0 à 10 % du socle). Le versement mensuel est assuré par l’ASP pour la part socle ; la part modulée est versée annuellement.

Des dispositifs ciblés existent : accompagnement spécifique de personnes détenues (EI en établissements pénitentiaires), ou dispositifs passerelles testés jusqu’à fin 2023 pour fluidifier les embauches. En 2025, les EI s’appuient surtout sur France Travail Insertion, les collectivités et les branches professionnelles pour co-construire les sorties durables (CDI/CDD longs, intérim, alternance).

Organisation efficiente et accompagnement socioprofessionnel

Une EI articule trois piliers : la production, l’accompagnement et la formation. Les encadrants techniques veillent à la qualité des livrables ; les conseillers en insertion construisent un parcours individualisé avec objectifs, jalons, ateliers collectifs et formations externes. Le tout se mesure via un tableau de bord : assiduité, compétences validées, progression vers l’emploi.

• 🧑‍🏫 Encadrement technique : standards, sécurité, tutorat en situation.
• 📋 Parcours : diagnostic, objectifs mensuels, preuves d’apprentissage.
• 🧩 Appuis de vie : mobilité, garde d’enfants, santé, budget.
• 🏭 Immersions : PMSP et périodes d’essai pour sécuriser les sorties.
• 📊 Indicateurs : taux de sortie positive, certifications, satisfaction clients.

Les résultats parlent. Une EI bien structurée améliore les soft skills (ponctualité, esprit d’équipe, communication) autant que les compétences techniques. L’entreprise cliente gagne un produit ou un service de qualité, et le territoire bénéficie d’emplois locaux et de circuits plus sobres. Voilà un cercle vertueux qui s’entretient par la preuve.

Envie de visualiser ? Des témoignages vidéo permettent de se projeter et de comprendre l’impact humain derrière les chiffres.

La suite logique consiste à explorer les secteurs où les EI excellent, notamment ceux de la transition écologique.

Entreprises d’insertion et écologie : réemploi, réutilisation et filières locales qui changent la donne

Beaucoup d’EI agissent là où l’impact social et environnemental se renforcent mutuellement. La preuve avec des acteurs emblématiques qui donnent une seconde vie aux objets, réduisent les déchets et forment à des métiers d’avenir. Ces activités répondent à une demande citoyenne forte : consommer mieux, allonger la durée de vie des produits, préserver les ressources.

Dans l’électroménager, Envie reconditionne, garantit et revend à prix accessible, tout en créant des emplois qualifiés en atelier et en magasin. Côté textile, Le Relais et le réseau Tissons la Solidarité structurent du tri, de la couture, de la teinture végétale ou du surcyclage, avec des débouchés réels. Le sport n’est pas en reste : La Recyclerie Sportive donne une nouvelle vie aux vélos, skis et équipements, tandis que les jouets passent entre les mains expertes de Rejoué pour repartir dans la boucle.

Dans l’économie circulaire, tout est opportunité d’apprentissage : diagnostic produit, démontage, remplacement de pièces, tests qualité, conseil client. Ce sont des compétences techniques, mais également des savoir-être transférables : rigueur, sécurité, pédagogie. L’ancrage territorial est fort, avec des points de vente, des tournées de collecte, des partenariats avec les collectivités et les bailleurs.

• ♻️ Réemploi : réparation, pièces détachées, seconde main attractive.
• 🧵 Upcycling textile : coupe, patronage, séries courtes, e-commerce.
• 🚲 Mobilité douce : réparation vélo, ateliers itinérants, formation sécurité.
• 🧸 Jouets : hygiénisation, reconditionnement, kits éducatifs.
• 🏗️ Bâtiment sobre : avec APIJ Bat, réemploi de matériaux, gestes bas carbone.

Au-delà du vert, l’insertion s’ancre aussi dans les services. La Conciergerie Solidaire démontre que l’accueil, la logistique légère et l’animation d’immeubles créent des emplois de proximité utiles et pérennes. Des initiatives comme Ateliers Sans Frontières ou Emmaüs Défi mêlent reconditionnement, e-logistique et accompagnement intensif, avec une exigence sociale élevée.

Pour y voir clair dans les différentes familles de l’insertion par l’activité économique, voici un panorama comparatif utile quand on hésite entre dispositifs.

Pour suivre l’actualité, les réseaux sociaux fourmillent d’initiatives locales et d’offres d’emploi en insertion.

Conclusion pratique de cette partie : les EI sont des accélérateurs de la transition écologique et de l’emploi local.

Créer ou transformer une structure en entreprise d’insertion : étapes concrètes et leviers de financement

De nombreuses structures se posent la question : comment devenir EI ou créer une EI ex nihilo ? La démarche suit le chemin d’une entreprise classique, avec un supplément d’âme et des exigences sociales formalisées. La clé est d’aligner un business plan viable avec un projet social crédible et un ancrage territorial fort.

Les grandes étapes pour réussir

Avant tout, une étude de marché sérieuse est indispensable : clients cibles, concurrence, prix, coûts de revient, flux de matières (notamment en réemploi). Vient ensuite la construction du modèle économique : marges, cycles de vente, saisonnalité, investissements, besoin en fonds de roulement, plan de formation des équipes et coûts d’accompagnement.

• 🔍 Étude d’opportunité : besoins clients, gisements (textile, DEEE, jouets, services).
• 🧮 Business plan : prévisionnel, seuil de rentabilité, trésorerie.
• ⚖️ Choix de la forme : association, SARL, SAS… (pas d’obligation spécifique).
• 🧑‍⚖️ Gouvernance : conseil d’administration, comité d’insertion, parties prenantes.
• 📑 Convention avec l’État (3 ans) : projet, publics visés, moyens, indicateurs.

La convention détaille les caractéristiques de la structure, le nombre de postes, les modalités d’accompagnement, l’adéquation avec l’écosystème local et les engagements d’insertion. Les offres sont déposées auprès de France Travail Insertion et les candidatures coorientées avec les partenaires sociaux. Les relations entreprises sont essentielles pour créer des débouchés. Ici, des réseaux comme Tissons la Solidarité ou des acteurs tels qu’Emmaüs Défi, Ateliers Sans Frontières, Le Relais, Envie et La Recyclerie Sportive offrent des retours d’expérience précieux.

Financements et aides : mix intelligent

Une EI vit principalement de son chiffre d’affaires. Les aides publiques viennent compenser la moindre productivité liée à l’accompagnement et au turn-over inhérent à l’insertion. L’aide au poste (socle + modulation) est la plus structurante. Des appels à projets territoriaux (collectivités, ADEME pour l’économie circulaire) peuvent financer des investissements, comme des bancs de test pour le reconditionnement ou des ateliers partagés.

• 💶 Aide au poste : socle révisé annuellement, modulation liée à l’impact.
• 🏛️ Subventions d’investissement : équipements, aménagements, sécurité.
• 🎓 Financements formation : OPCO, Régions, programmes sectoriels.
• 🤝 Partenariats entreprises : achats responsables, dons de matériel.
• 🌍 Appels à projets : économie circulaire, inclusion, mobilité.

À ne pas négliger : la relation client. Une promesse claire (qualité, délai, SAV, garantie) fidélise et sécurise des volumes. L’insertion est une valeur ajoutée, pas un argument unique. Les grands comptes s’engagent via des clauses sociales d’insertion, mais attendent la même exigence opérationnelle que chez tout fournisseur.

Pour aller plus loin, des conférences et retours d’expérience sont disponibles en vidéo pour décoder la mise en œuvre terrain.

En résumé opérationnel : penser “entreprise performante” et “projet social solide” dès le départ maximise les chances de réussite.

Parcours d’insertion réussi : étapes, outils concrets et partenariats qui comptent

Un parcours bien conçu démarre par un diagnostic sans jugement : compétences existantes, envies, freins à lever. De là, un plan d’action se structure avec des objectifs mensuels, des formations et des mises en situation. L’ambition n’est pas d’aller vite, mais d’aller loin, en favorisant l’autonomie.

Étapes type d’un parcours

Les trois premiers mois servent souvent de rampe : reprendre des habitudes, retrouver la confiance, sécuriser les aspects de vie qui bloquent (garde d’enfants, santé, budget). Ensuite, la montée en compétences s’accélère avec des appuis métiers (tutorat, habilitations, e-learning) et des immersions externes. Le dernier tiers prépare la sortie : CV ciblé, simulation d’entretien, périodes d’essai chez un employeur partenaire.

• 🧭 Accueil : contrat, objectifs, règles du jeu claires.
• 🧱 Stabilisation : mobilité, logement, santé, micro-crédits.
• 📚 Formation : gestes métiers, sécurité, savoir-être pro.
• 🏭 Immersions : PMSP, périodes d’essai sécurisées.
• 🚀 Sortie durable : CDI, CDD long, alternance, intérim qualifiant.

Le rôle des partenaires est décisif. France Travail Insertion facilite l’orientation et l’accès aux dispositifs. Les associations locales accompagnent des sujets précis (santé mentale, violences, accès aux droits). Les entreprises ouvrent leurs portes pour des immersions, des visites de site et la co-construction de fiches de poste accessibles.

Pour Nadia, la progression se matérialise par des jalons tangibles : validation CACES, 0 retard sur un mois, recommandation client, puis période d’essai réussie chez un logisticien engagé. L’EI a gardé le cap : l’aider à devenir employable et se projeter au-delà du contrat.

• 📈 Mesure d’impact : sorties positives, montée en compétences, bien-être.
• 🧩 Personnalisation : pas de parcours standard, adaptation permanente.
• 🤗 Culture d’équipe : encouragements, feedbacks, droit à l’essai.
• 🛡️ Prévention : sécurité, ergonomie, temps de récupération.
• 🔁 Amélioration continue : rétrospectives, partage de bonnes pratiques.

Pour se connecter à l’écosystème et amplifier l’impact, des réseaux inspirants existent : Ateliers Sans Frontières pour l’e-logistique et le réemploi informatique, Emmaüs Défi pour les publics très éloignés de l’emploi, Tissons la Solidarité pour la mode éthique, La Recyclerie Sportive pour le sport durable. La coopération entre acteurs rend possible des trajectoires autrement inaccessibles.

À garder en tête au moment d’agir : une entreprise locale, un geste d’achat responsable, un CV transmis peuvent déclencher une nouvelle trajectoire de vie. Le pas à faire aujourd’hui ? Choisir une prestation auprès d’une EI du territoire ou déposer une candidature si une reprise d’emploi vous tente.

Questions fréquentes sur le fonctionnement des entreprises d’insertion

Une EI est-elle une association ou une société ?

Les deux sont possibles. Aucune forme juridique n’est imposée : association, SARL, SAS… Ce qui compte est la convention avec l’État, le projet social formalisé et l’activité marchande réelle.

Qui peut être recruté en CDDI ?

Des personnes éloignées de l’emploi : jeunes sans qualification, bénéficiaires de minima sociaux (RSA, AAH, ASS), demandeurs d’emploi de longue durée, personnes suivies par l’aide sociale, personnes détenues via des EI implantées en établissements pénitentiaires.

Comment sont financées les EI ?

Principalement par la vente de biens et services. Les aides publiques (aide au poste socle + modulation, dispositifs ciblés) compensent l’investissement d’accompagnement et soutiennent les résultats d’insertion.

Quelle durée et quel temps de travail en CDDI ?

Le CDDI dure de 4 à 24 mois. Le temps de travail est compris entre 20 et 35 heures hebdomadaires, modulable selon les besoins du parcours et du salarié.

Où trouver une EI près de chez soi ?

En contactant France Travail Insertion, les réseaux sectoriels (ex. Envie, Le Relais, Tissons la Solidarité), ou des acteurs reconnus comme Emmaüs Défi, La Recyclerie Sportive, Rejoué, La Conciergerie Solidaire, ou encore des entreprises du BTP comme APIJ Bat. Des médias citoyens comme Asseureka recensent régulièrement des initiatives locales.